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Social Café : La précarité étudiante, quand il faut choisir entre manger ou étudier

Ce mercredi 7 décembre dernier, le deuxième Social Café de la saison 2022-2023 ouvrait le débat sur une thématique poignante et très actuelle : la précarité étudiante. En effet, ce thème est de plus en plus abordé au sein des débats et des différents médias. Impactant gravement la vie quotidienne des plus démunis, la précarité toucherait actuellement plus de ⅔ des étudiants, issus de toutes les filières, de tous les horizons. De plus, la précarité est encore aujourd’hui trop abordée sous son aspect économique, alors qu’elle affecte également la santé mentale de ceux qui la subissent. Plus de 83% des étudiants s’estiment être en mauvaise santé mentale.


Le mois dernier, l’inflation se stabilisait à 6,2% sur un an selon l’Insee, un chiffre conséquent. Cette hausse des prix généralisée et particulièrement accrue pour les produits de nécessité alimentaire avec une augmentation de plus de 9%, réduit considérablement le pouvoir d’achat des étudiants, qui pour la plupart ont déjà du mal à joindre les deux bouts. Selon certains sondages, jusqu’à 54% des étudiants estimeraient ne pas manger à leur faim.

 

Mais comment solutionner le problème de la précarité étudiante qui est exacerbée depuis la crise sanitaire ? Comment aider ces jeunes ?



Pour essayer de répondre à ces questions et de nourrir le débat actuel, nous avons reçu lors de notre Social Café deux intervenants : Séverine Deliessche et Louis Baudouin.


Séverine Deliessche est la Directrice Adjointe au CROUS (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires) de Lille - Nord Pas de Calais depuis 2020. Le CROUS est une institution publique qui apporte des aides à tous les étudiants de France et tout particulièrement aux étudiants en difficulté financière, en proposant notamment des bourses sur critères sociaux, des logements en résidences universitaires ou encore des repas à tarif réduit. Grâce à sa position au sein de l’établissement, Séverine Deliessche est confrontée tous les jours à la précarité étudiante et met tout en œuvre pour y remédier.


Notre deuxième intervenant est Louis Baudouin, président de l’association EDHEC Job Management (EJM) et étudiant à l’EDHEC. EJM est la première Job Service Étudiante de France, et a pour objectif de mettre en relation des entreprises et des étudiants de l’EDHEC pour des missions rémunérées ponctuelles.



Pour introduire le débat, nos deux intervenants ont proposé chacun leur définition de la précarité étudiante :


Pour Louis Baudouin, la précarité survient quand un étudiant “ne peut pas étudier sans se questionner” sur son autonomie et son bien-être au quotidien. En effet, cette définition implique implicitement la notion de santé psychologique des étudiants qui sombrent parfois dans des schémas de pensées complexes et négatifs face à leur propre précarité.


Pour Mme Deliessche, deux indicateurs témoignent au CROUS d’une situation de précarité : une demande de bourse et des remontées alarmantes de la part des services sociaux sur cette situation. Ces derniers mois, le CROUS a tristement observé une hausse significative des entretiens sociaux et des aides accordées aux personnes en situation de précarité.


La crise sanitaire et l’inflation actuelle ont-elles exacerbé les situations de précarité ? Quelles sont les aides disponibles pour ces étudiants ?


Pour Louis Baudouin, l’inflation globalisée a fait diminuer le pouvoir d’achat en équivalent temps de travail des étudiants de l’EDHEC et leur a souvent permis de prendre conscience de la vraie valeur de l’argent et de la difficulté d’atteindre une autonomie financière complète. EJM a mis en place des levées de fonds pour soutenir des associations, pour lutter contre la précarité financière mais aussi mentale des étudiants de la MEL, et lutter contre le manque d’informations sur les aides disponibles à l’échelle nationale et sur les différents parcours étudiants disponibles.


Le CROUS dispose de deux types d’aides financière pour aider les étudiants du Nord-Pas-De-Calais, dont 33% sont boursiers : des aides annuelles établies mensuellement et des aides ponctuelles pour aider les plus démunis, comme les étudiants internationaux qui sont souvent plus touchés par la précarité (plus de 20 à 30% selon Mme Deliessche). De plus le CROUS propose près de 10 000 logements, un chiffre conséquent même si les tensions quant à l’accès restent très fortes. Certains sont réhabilités pour le confort des étudiants, diminuant les offres sur le marché. En 2020, on observait en moyenne 6 demandes par logement proposé. Enfin, le CROUS gère des restaurants universitaires, qui proposent des repas à 3,30 € à tous les étudiants, ou 1€ pour les étudiants boursiers. Malgré la hausse des prix, le CROUS a décidé de ne pas réduire les portions ni la qualité des repas proposés, sachant que la demande dans la restauration a augmenté de plus de 60% depuis 2020.



Qu’en est-il de la santé mentale des étudiants ? Peut-on parler de précarité mentale ?


La santé mentale des étudiants est bien sûr affectée par la précarité financière. Depuis la crise sanitaire, la situation alarmante des étudiants a poussé le CROUS à prendre de nouvelles mesures, comme proposer des services d’écoute aux étudiants ou former le personnel de résidence à répondre aux appels de détresse mentale.


Pour nos deux intervenants, la précarité financière est étroitement liée à une forme de précarité mentale qu’ils définissent comme « un manque » dû à l’exclusion involontaire des schéma sociaux et culturels. En effet, un étudiant qui n’est pas en capacité de manger à sa faim ou qui a simplement un budget serré ne peut pas se permettre de faire des sorties au bar, des soirées, des visites de musées payantes, des voyages, etc.


Le manque de lien social qui en résulte est dévastateur et c’est selon Louis Baudouin un aspect de la précarité qui est à peine pris en compte aujourd’hui. Selon lui, la santé mentale des étudiants était un sujet absolument tabou (entre les étudiants eux-mêmes) jusqu’à la crise sanitaire. Aujourd’hui et en tant qu’étudiant, Louis Baudouin voit une réelle progression de la parole au sein des écoles, et souhaite soutenir cette évolution grâce à la mise en place du fond de dotation d’EJM.



Comment les étudiants peuvent-ils concilier études et travail ?


Tout l’enjeu de la précarité pour les étudiants est de réussir à gagner de l’argent en travaillant, alors même qu’il faut assister aux cours et fournir un travail personnel en journée. La conciliation est difficile. Louis Baudouin explique qu’EJM propose des missions ponctuelles, pour certaines à distance et à horaires flexibles, pour permettre aux étudiants de travailler sans s’engager sur le long terme ni empiéter sur les heures de cours. EJM ne travaille qu’avec des entreprises qui acceptent de rémunérer les étudiants 10€ net de l’heure, soit plus que le SMIC net horaire (8,76€). De plus, les missions d’EJM ne demandent aucune expérience préalable.


En plus de verser de l’argent aux étudiants boursiers, le CROUS leur propose aussi des jobs (l’équivalent de 50 temps pleins pour le CROUS de Lille) mais ils ont du mal à trouver des candidats. En effet, ils ont surtout besoin de mains pour la restauration, ce qui est souvent mal combinable avec les emplois du temps des étudiants.

Enfin, nos deux intervenants ont insisté sur l’idée que pour trouver un job étudiant, il faut se lancer et tout oser, et que toute expérience est bonne à prendre et qu’il ne faut pas hésiter à faire fructifier les savoirs déjà acquis, en donnant des petits cours par exemple.

 

Nous tenons à remercier chaleureusement Séverine Deliessche et Louis Baudouin pour leur temps et leur investissement. Enfin, n’hésitez pas à suivre Develop sur les réseaux sociaux pour vous tenir informés des prochains évènements.









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